Un nuage de livres au bord de la rivière Yongning
Dans une ville provinciale paisible du sud de la Chine, la rénovation d’immeubles existants pour y installer une librairie est plus qu’un simple projet de relookage: c’est une œuvre d’une véritable importance culturelle. Dans le district de Huangyan, à Taizhou, le studio Wutopia Lab, basé à Shanghai, a recousu des bâtiments désaffectés sur les rives de la rivière Yongning. Le résultat, la librairie Duoyun.
Le projet s’inspire d’une approche sensorielle du contexte: le flux relaxant de la rivière, le long de laquelle la ville s’anime d’agréables promenades quotidiennes, la brise et le plaisir qu’elle procure en emportant les gouttelettes d’eau diffuses, ont conduit les architectes du studio Wutopia Lab à y élever un nuage qui symboliserait un monde, celui de la culture, où il fait bon se blottir, laissant tout le reste derrière soi. Un élément qui s’étend doucement sur le fleuve dans un mouvement horizontal contrastant avec la verticalité des édifices alentours. Les constructions occupant déjà le site sont entièrement recouvertes de murs-rideaux en panneaux en aluminium perforé préfabriqués blancs, révélant les traces du passé et unifiant les volumes disjoints. Le plan imite la typologie traditionnelle du “shuyan”: les bâtisses s’articulent autour de la cour intérieure constituant l’entrée de la librairie Duoyun et le point d’appui de la composition, une sorte de cours entourées de volumes. Au rez-de-chaussée, se trouvent le coin lecture, le café-restaurant et les lieux administratifs. A l’étage supérieur, un espace d’exposition, une salle regorgeant de reproductions de livres rares, une autre de lecture et des terrasses d’interaction et de jeux d’enfants. Les teintes vives des intérieurs marquent les aires fonctionnelles: la couleur orange extraite de l’orange la plus célèbre de Huangyan dans la cafétéria ; le vert classique des bibliothèques de Duoyun dans la zone culturelle et créative ; le cyan dans celle dédiée à Taizhou ; le cramoisi dans l’espace relationnel ; le rose et le violet dans la galerie d’exposition. Un lieu où l’on ne découvre pas seulement des livres, mais aussi et surtout la magie d’un langage artistique qui construit une identité là où régnait l’indifférence et qui confère une forme déchiffrable au caractère de l’œuvre et, par conséquent, de la ville entière.